Le café colombien est bien plus qu’une simple boisson : c’est une véritable institution culturelle et économique qui incarne le savoir-faire, la passion et l’histoire de la Colombie. Considéré comme l’un des meilleurs cafés au monde, il séduit par sa qualité exceptionnelle, son goût raffiné et ses arômes uniques. Mais qu’est-ce qui rend le café colombien si spécial ? Explorons ses origines, ses particularités et son impact.
Une histoire ancrée dans la culture
L’histoire du café en Colombie remonte au XVIIIe siècle, lorsque les premiers plants de caféiers furent introduits par des missionnaires jésuites. Cependant, ce n’est qu’au XIXe siècle que le café s’est imposé comme une culture majeure grâce à la demande croissante en Europe et aux États-Unis. Cette période a marqué le début de l’exportation massive de café colombien, favorisée par des conditions idéales de climat et de sol dans les régions andines.
Dans les années 1920, le café représentait déjà une part significative des exportations colombiennes, contribuant à près de 50% des revenus d’exportation du pays à cette époque. Cette industrie a permis de développer des infrastructures rurales et de structurer l’économie agricole. En 1959, la création de la marque Café de Colombia a consolidé l’identité du café colombien sur le marché international. Le personnage fictif de Juan Valdez, lancé la même année, a joué un rôle clé dans la promotion des grains colombiens comme gage de qualité. Ce symbole mondialement reconnu incarne la culture, la tradition et le savoir-faire des producteurs locaux.
Aujourd’hui, environ 2% de la population colombienne participe à la production de café, avec plus de 500 000 familles dépendant de cette culture. Cette activité façonne non seulement l’économie mais aussi les paysages et la vie sociale des régions rurales. Le café n’est pas seulement une boisson en Colombie : c’est un élément central de son patrimoine, célébré dans des festivals locaux et des initiatives de tourisme rural comme le célèbre Triangle du Café.
L’histoire du café en Colombie est un récit de résilience et d’adaptation, marqué par des succès commerciaux et des défis environnementaux. Ce produit emblématique continue de connecter le pays à ses racines tout en s’ouvrant aux marchés mondiaux.
Un terroir unique au monde
La Colombie est l’un des rares pays au monde à pouvoir produire du café toute l’année grâce à son climat équatorial. Les deux récoltes principales (celle de la mitaca et celle de la grande saison) s’expliquent par l’alternance des saisons sèches et pluvieuses dans différentes régions. L’altitude, qui varie entre 1 200 et 2 200 mètres au-dessus du niveau de la mer, est parfaite pour le café arabica, permettant un développement lent des cerises et une concentration accrue des arômes.
Les températures moyennes oscillent entre 18 et 24°C, et les sols volcaniques riches en minéraux apportent aux caféiers les nutriments nécessaires à leur croissance. Ces caractéristiques rendent chaque région productrice unique, conférant des profils aromatiques spécifiques aux cafés.
Les régions caféières colombiennes, réparties principalement entre le nord, le centre et le sud du pays, produisent des grains aux saveurs distinctes :
Département | Part de la production nationale | Caractéristiques principales |
---|---|---|
Huila | ~18-20% | Acidité moyenne à élevée, brillante et citronnée. Douceur remarquable avec des notes de caramel, de fruits jaunes (pêche, fruit de la passion) et des notes florales. |
Antioquia | ~15-18% | Notes sucrées, chocolatées et de noix (amandes, noix). Moyennement corsé à corsé, avec une acidité faible et équilibrée. |
Tolima | ~12-15% | Acidité vive, corps moyennement élevé. Notes de chocolat, de fruits tropicaux et de subtiles touches florales. |
Caldas | ~10-12% | Café doux avec une acidité moyenne et un corps équilibré. Notes douces de caramel et de fruits secs. |
Risaralda | ~8-10% | Acidité moyenne à élevée, corps crémeux. Notes de chocolat, de caramel et de fruits mûrs. |
Quindío | ~6-8% | Acidité délicate, corps moyen. Notes de fruits secs, de miel et une légère touche florale. |
Cauca | ~8-10% | Acidité vive et fruitée, corps moyen. Notes de fruits tropicaux, de fleurs et de miel. |
Nariño | ~5-8% | Acidité élevée et brillante avec des notes d’agrumes. Léger à moyennement corsé, avec des arômes complexes de fruits sucrés et de fleurs. |
Il existe de nombreuses variétés de café, mais certaines sont plus reconnues que d’autres pour leur qualité :
- Caturra : cette variété est appréciée pour son excellent équilibre entre acidité, corps et douceur. C’est l’une des variétés les plus cultivées en Colombie et elle est très prisée pour sa polyvalence.
- Typica : une autre variété importante, le Typica est connu pour sa complexité, avec un profil de saveurs riche, incluant des notes fruitées et florales. Il est souvent utilisé dans les cafés de qualité supérieure.
- Gesha (ou Geisha) : originaire d’Éthiopie, la variété Gesha est très prisée pour sa complexité et son profil aromatique exceptionnel. Elle est cultivée dans les régions de haute altitude en Colombie et peut atteindre des prix élevés en raison de sa qualité, offrant des notes florales, fruitées et semblables à celles du thé.
- Castillo : un hybride développé pour être résistant aux maladies, le Castillo est devenu de plus en plus populaire. Il est connu pour son goût net et lumineux, avec des notes de chocolat, de caramel et d’agrumes.
- Bourbon : cette variété, souvent cultivée dans des régions de haute altitude, est prisée pour son goût riche et sa tasse douce, avec des touches de fruits et de chocolat.
La Colombie est également l’un des rares pays à avoir une appellation d’origine protégée pour son café, garantissant son authenticité et sa qualité. Les grains de café sont souvent sélectionnés à la main pour s’assurer que seules les cerises mûres sont récoltées. Cela reflète l’engagement des producteurs envers l’excellence.
La production de café : échelle nationale et internationale
La Colombie est le troisième plus grand producteur de café au monde, après le Brésil et le Vietnam, et est le premier producteur mondial de café arabica. En 2022, la production colombienne s’élevait à environ 11,2 millions de sacs de 60 kg, soit environ 8% de la production mondiale de café (estimée à 170 millions de sacs de 60 kg).
Les producteurs colombiens cultivent presque exclusivement du café arabica, considéré comme de meilleure qualité pour ses arômes complexes et son acidité douce.
La Colombie est composée de plusieurs régions clés pour la production de café, notamment le Huila, l’Antioquia, le Triangle du Café (incluant Quindío, Caldas et Risaralda), le Tolima, le Nariño et le Santander. Ces zones, réparties sur différents climats et altitudes, contribuent à la diversité et à la qualité des cafés colombiens.
Environ 95 % de la production nationale est destinée à l’exportation, principalement vers des marchés majeurs tels que les États-Unis, qui représentent 40 % des exportations, ainsi que l’Allemagne, le Japon et la Belgique. Ces exportations renforcent la réputation de la Colombie comme producteur de cafés de haute qualité dans le monde entier.
Malgré sa réputation mondiale, la production colombienne fait face à plusieurs défis, notamment :
- Coûts élevés : La récolte manuelle, essentielle pour garantir la qualité, est plus coûteuse que les méthodes mécanisées utilisées ailleurs.
- Changement climatique : L’augmentation des températures affecte les zones propices à la culture.
- Prix volatils : Les fluctuations des prix du marché international mettent en péril la stabilité économique des petits producteurs.
Un impact économique et social
Le café est bien plus qu’un produit agricole en Colombie : c’est un pilier économique majeur. En 2022, le secteur du café a généré environ 2,8 milliards de dollars de revenus pour le pays, représentant près de 8 % des exportations totales et consolidant sa place parmi les principaux contributeurs à l’économie nationale. La production de café mobilise plus de 500 000 familles agricoles, ce qui représente environ 2,2 millions de personnes, soit 5 % de la population du pays, qui dépendent directement ou indirectement de cette activité pour leurs moyens de subsistance
Les exploitations caféières en Colombie sont principalement de petites fermes familiales, avec une taille moyenne d’environ 1,4 hectare. Ce modèle favorise la durabilité et la qualité, mais expose également les producteurs à une forte vulnérabilité face aux fluctuations des prix mondiaux, aux coûts de production élevés et aux effets du changement climatique.
La culture du café joue également un rôle central dans le tissu social de nombreuses régions rurales. En plus de créer des emplois, elle contribue à maintenir les communautés dans les campagnes, limitant ainsi l’exode rural. Le Triangle du Café, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, est un exemple frappant de l’interconnexion entre culture, société et agriculture. Cet héritage, transmis de génération en génération, fait partie de l’identité colombienne et est célébré à travers des événements locaux comme les fêtes du café dans des villes comme Manizales.
Cependant, l’impact social du café n’est pas exempt de défis. Les revenus des producteurs restent souvent faibles : selon la Fédération Nationale des Caféiculteurs, 80 % des familles agricoles vivent sous le seuil de pauvreté. Les coûts de production élevés, la dépendance aux exportations et la volatilité des prix mondiaux compliquent la situation. Les initiatives pour améliorer les conditions, comme la certification équitable ou biologique, gagnent en importance, mais elles ne couvrent qu’une fraction des exploitations.
En réponse à ces défis, des projets communautaires et des coopératives de caféiculteurs jouent un rôle clé pour renforcer la résilience des producteurs. Par exemple, des programmes comme ceux soutenus par la Fédération Nationale des Caféiculteurs (FNC) promeuvent l’accès à l’éducation, à la santé et aux infrastructures dans les zones rurales. Le café colombien, souvent cultivé sous ombrage et avec des méthodes traditionnelles, est également un exemple d’agriculture durable respectueuse de la biodiversité locale.
Ainsi, au-delà de son importance économique, le café en Colombie reste un vecteur puissant de transformation sociale, en apportant des opportunités économiques, en préservant des traditions séculaires, et en maintenant les communautés rurales vivantes.
Découvrir le café colombien
Acheter du café de spécialité
Déguster une tasse de café colombien n’est pas une tâche compliquée. Que ce soit en Colombie ou à l’étranger, les productions colombiennes occupent une place de choix dans les rayons de nombreux magasins. Cependant, il est important de garder à l’esprit que le café, tout comme le vin, se décline en une multitude de qualités. Les véritables amateurs de ce breuvage te le diront : tous les cafés ne se valent pas. Bien sûr, les goûts personnels jouent également un rôle majeur dans l’appréciation.
La première chose à savoir est qu’il existe une nomenclature établie par la Specialty Coffee Association (SCA). Utilisée par les experts du monde entier, cette grille d’évaluation permet de juger le café selon plusieurs critères : parfum, arôme, arrière-goût, acidité, corps, équilibre, uniformité, pureté, et bien d’autres. Pour être considéré comme un café de spécialité, le café doit obtenir un score minimum de 80/100. Les scores les plus prisés sont classés en 80+, 85+ et 88+. Cependant, moins de 5 % des cafés dans le monde obtiennent cette appellation. Naturellement, les cafés de spécialité sont plus coûteux que les cafés standards.
Si trouver du café colombien classique est relativement facile, dénicher un café colombien de spécialité avec une note de 80+, 85+, ou 88+ est bien plus rare. Cela nécessite presque toujours de se tourner vers des professionnels spécialisés, tels que :
Les touristes ont souvent tendance à faire un amalgame (peut-être un biais cognitif ?) lorsqu’ils visitent une finca de café. À la fin de la visite, ils ont généralement la possibilité d’acheter du café, en grain ou moulu. C’est une excellente initiative, car cela soutient économiquement le producteur tout en offrant un souvenir éphémère de Colombie. Cependant, il est essentiel de comprendre que le café vendu dans la plupart des fincas bien connues, notamment autour de Salento, Jardín ou Jericó, est souvent de qualité similaire à celui que l’on peut trouver dans les grandes surfaces en Europe ou au Canada.
Visite de fincas cafeteras
La Colombie regorge de fincas cafeteras, ces fermes dédiées à la production de café, et de nombreuses d’entre elles, situées dans des zones touristiques, ouvrent leurs portes aux visiteurs curieux. Que vous soyez un passionné de café ou simplement en quête de découvertes culturelles, ces lieux offrent une plongée fascinante dans le monde du café colombien.
On trouve des fincas dans plusieurs régions du pays, avec une forte concentration dans les Andes, au cœur de la Colombie. Les petits villages, souvent entourés de plantations, constituent d’excellents points de départ, mais il est aussi possible de visiter certaines fincas lors d’excursions d’une journée au départ de grandes villes comme Bogotá.
Pour une immersion totale, de nombreuses fincas proposent des hébergements champêtres, parfaits pour savourer la tranquillité de la campagne colombienne et découvrir la vie traditionnelle.
Voici quelques destinations incontournables pour visiter une finca cafetera, adaptées à différents itinéraires :
- Bogotá : Hacienda Coloma, La Palma y el Tucán
- Bucaramanga / San Gil : Hacienda el Roble
- Jardín : Finca Cafetera Los Ángeles, Café del Jardín
- Jericó : La Nohelia, Finca de Ariel
- Manizales : Finca Tío Conejo, Hacienda Venecia
- Minca : Finca Victoria, Finca San Rafael
- Salento : Finca De Don Elias, Las Acacias, Finca El Ocaso Salento, Finca Buenos Aires, Entre Bosques