Paramo des Andes, Colombie

Paramos : à la découverte d’un écosystème andin unique et vital

Table des matières

Imagine-toi perché sur les hauts plateaux andins, à la découverte des paramos colombiens, un écosystème aussi mystérieux que vital. À ces altitudes, entre 3 000 et 5 000 mètres, un monde unique s’étend, jouant un rôle clé dans l’équilibre écologique. Les paramos sont bien plus qu’une simple étendue de paysages ; ce sont des réservoirs naturels d’eau, essentiels pour les rivières et les écosystèmes avoisinants.

Dans cet article, nous plongerons dans les secrets de ces hautes terres, explorant la biodiversité exceptionnelle qui s’y cache, et plus encore. Des plantes uniques, des oiseaux rares et des microclimats intrigants, les paramos sont une pépite de diversité.

Photo de Michael Lechner

Les paramos : un monde à part

Les paramos sont des écosystèmes de landes situés en haute altitude dans les régions andines. Présents uniquement au Pérou, Équateur, Colombie et Venezuela, c’est en Colombie que l’on recense environ 50% de ces paramos.

Ces milieux uniques se situent entre la limite des arbres et celle des neiges éternelles, à une altitude allant de 3 000 à 5 000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Malgré leur proximité avec l’équateur, ils arborent des climats froids plus semblables aux Highlands écossais qu’aux tropiques, en raison de leur élévation significative. Cette altitude élevée leur confère également un caractère austère et lunaire.

Décrits par les conquistadores espagnols comme la « terre de la brume », les paramos sont soumis à des vents et des précipitations abondants. Avec des températures annuelles moyennes oscillant entre 2 et 10°C, qui chutent davantage la nuit ou en altitude, ces environnements peuvent revêtir un aspect sauvage et apparemment impitoyable.

La zone d’altitude de l’écorégion reçoit plus de 2 000 mm/an de précipitations et son taux d’humidité atteint en moyenne 80%, car elle se trouve dans la zone de convergence intertropicale (ZIT). La ZIT est influencée par des zones de basse pression créées près de l’équateur, qui produisent de grandes quantités de précipitations et des vents forts. Cela freine la croissance des arbres et donne lieu à un environnement de prairies alpines tropicales.

Cependant, un processus graduel s’étendant sur des centaines de milliers d’années a conféré aux paramos des caractéristiques d’une importance écologique remarquable. Cela se manifeste dans la diversité de la vie animale et végétale, le stockage significatif de carbone et la contribution cruciale à l’approvisionnement en eau douce.

Parc Naturel National de Chingaza / Photo de Hector Orjuela

Paramos, terres sacrées des indigènes

L’importance culturelle de ces environnements est profondément enracinée et ancienne. Un exemple concret est celui des paramos de Colombie, qui revêtent une signification cruciale dans la cosmologie des Muisca-Chibcha, des peuples précolombiens habitant les hauts plateaux du centre de la Colombie avant l’arrivée des Espagnols. La nature et sa préservation constituait le pilier central de leur vision du monde et de leur rôle en son sein. Selon leur système de croyances, les paramos ont donné naissance à leur figure maternelle primordiale, Bachué, ce qui a suscité un profond respect envers ces terres, le paramo devenant le lieu central de rituels sacrés.

Les Chibcha ne résidaient pas sur les paramos en raison de leur statut de terres sacrées, tout comme on n’habiterait pas une église, un temple ou une mosquée. Au contraire, ils traversaient ces environnements pour s’engager dans des rituels méditatifs et sacrés, tels que celui de l’initiation à l’âge adulte. Au cours de ce rituel, les initiés se voyaient confier la responsabilité de prendre soin du monde naturel et de le protéger.

Pour ces groupes indigènes, la nature surpassait même la famille en importance. En tant que pourvoyeuse ultime, le monde naturel était considéré comme l’entité la plus sacrée. L’humanité devait être en harmonie avec la Terre mère, en respectant ses richesses plutôt qu’en les exploitant. Le concept de destruction des espaces naturels pour l’extraction de ressources était totalement incompatible avec cette perspective, car la nature, source de vie, ne pouvait être détruite sans compromettre la création de richesses. Ainsi, l’idée même d’extraire des ressources était et demeure inconcevable pour les groupes indigènes de Colombie, qui ont longtemps milité en faveur de la protection de ces terres.

Laguna de Iguaque, Sanctuaire de la Faune et la Flore d’Iguaque

Faune étonnante des paramos

Les cieux des paramos sont dominés par deux figures emblématiques et aux extrêmes. d’un côté le condor des Andes, l’un des plus grand du monde avec 3,50m d’envergure, et de l’autre côté, plusieurs espèces de colibri (dont le colibri casqué), le plus petit oiseau du monde et pesant moins de 20g ! En planant majestueusement dans les courants ascendants, le condor représente la grandeur et la puissance, un véritable seigneur des hauteurs. D’un autre côté, les colibris, avec leurs battements d’ailes frénétiques leur permettant de reculer, ajoutent une touche vibrante et colorée à ce ciel souvent brumeux.

L’ours à lunettes, également connu sous le nom d’ours des Andes (et unique ours en Amérique du Sud !), se dévoile comme une figure énigmatique dans les paramos colombiens, démontrant une remarquable adaptation aux conditions extrêmes de vie. Son pelage dense et sa silhouette robuste témoignent de sa résilience face au froid et aux vents persistants. En tant que maillon essentiel de l’écosystème paramo, cet omnivore joue un rôle crucial dans la régulation de la végétation, contribuant à l’équilibre délicat entre les espèces.

Le paramo possède la flore de haute montagne la plus riche au monde et présente un taux d’endémisme élevé. On y trouve quelque 70 espèces de mammifères, 15 de reptiles, 87 d’amphibiens, 154 d’oiseaux et 130 de papillons. Parmi les autres mammifères charismatiques, on trouve le tapir des montagnes andines, le renard des Andes, le coati de montagne, la belette à longue queue et le cochon d’Inde.

L’écorégion est également désignée comme une zone d’oiseaux endémiques (EBA) avec de nombreux oiseaux limités à l’habitat du paramo, bien que peu d’entre eux soient strictement limités à cette écorégion. Parmi les espèces quasi endémiques, on trouve l’érione à robe noire et le toui à front roux.

Ours à lunettes / Photo de Linnaea Mallette

Flore extraordinaire des paramos

Le paramo n’est pas une forêt, mais une prairie à l’altitude la plus élevée, qui présente une végétation distincte d’herbes à touffes, d’arbustes coriaces, avec des rosettes et des plantes en coussins. Les arbustes que l’on trouve dans le paramo sont des arbustes microphylles, qui sont particulièrement adaptés aux rayons ultraviolets à cette altitude.

La végétation des paramos démontre une remarquable capacité à atténuer les risques d’inondations en période d’abondance d’eau, à faire face aux sécheresses en période de rareté d’eau, et à minimiser l’impact de l’érosion du sol. On estime que ces écosystèmes abritent environ 4 700 espèces végétales, dont 60% sont endémiques, renforçant ainsi leur importance en termes de diversité biologique et de préservation des équilibres écologiques. Parmi les spécimens les plus remarquables, on trouve :

  1. Frailejones : ces plantes emblématiques des paramos sont reconnaissables à leurs grandes rosettes de feuilles duveteuses, qui leur confèrent une apparence unique. Les Frailejones jouent un rôle crucial dans la régulation des flux d’eau et sont essentiels pour la préservation de l’écosystème.
  2. Puya de Paramo : cette plante spectaculaire se distingue par ses longues tiges florales qui peuvent atteindre plusieurs mètres de hauteur. Leur floraison est un événement impressionnant et attire de nombreux pollinisateurs.
  3. Senecio : certaines espèces de Senecio, également connues sous le nom de « séneçon », ajoutent une diversité remarquable à la flore des paramos. Leurs fleurs colorées contribuent à la palette vibrante de ces écosystèmes.
  4. Lupins queue-de-renard : ces plantes aux fleurs délicates et colorées ajoutent une touche de beauté aux paysages des paramos. Elles sont adaptées aux sols acides et aux conditions météorologiques difficiles.
  5. Lauriers : certains lauriers indigènes prospèrent dans les paramos, apportant une contribution importante à la biodiversité végétale. Leur feuillage persistant résiste aux variations climatiques.

La flore des paramos joue un rôle essentiel dans le maintien de l’équilibre écologique régional, en fournissant des services écosystémiques tels que la régulation des cours d’eau (fournit près de 70% de l’eau potable du pays !), la rétention du carbone et la préservation de la biodiversité.

Gros plan sur la plante frailejon / Photo de Michael Lechner

Paramos et conservation en Colombie

Actuellement, la construction de routes vers des zones auparavant inaccessibles constitue l’une des principales menaces pesant sur le paramos. Une autre source d’inquiétude est l’expansion des activités d’élevage et d’agriculture, où les ressources des paramos sont exploitées, et la végétation est délibérément brûlée pour améliorer la qualité du fourrage destiné aux animaux domestiques.

Le changement climatique, amplifié dans les Andes, induit une augmentation des températures et une diminution des précipitations dans les páramos, qui se réchauffent 1,6 fois plus rapidement que les basses terres. Cet impact est clairement observé dans le parc national de Los Nevados, où les glaciers au sommet de volcans majeurs fondent rapidement. Les « nevados » autrefois enneigés, comme El Quindio, ont perdu leurs glaciers, se transformant en « paramillos ». Ce réchauffement entraîne une sécheresse des páramos, compromettant les écosystèmes sensibles et exacerbant les défis de conservation, notamment la fonte des glaciers et la diminution des précipitations en altitude.

En Colombie, les paramos jouissent d’une protection, mais la mise en œuvre de la loi et le nombre de personnel dédié demeurent un défi persistant. Le pays compte 37 complexes biogéographiques de páramo. Ils sont répartis dans les cordillères occidentale, centrale et orientale, la Sierra Nevada de Santa Marta. Les principales aires naturelles protégées de Colombie comprennent le parc naturel national de Chingaza, le parc naturel national de Sumapaz, le parc naturel national El Cocuy, le Sanctuaire de la Faune et la Flore d’Iguaque, le parc naturel national de Los Nevados, le parc naturel national Puracé, le parc naturel national de Las Hermosas, le Paramo de Ocetá.

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Les auteurs : Caro & Romain

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